Atelier d'écriture

L’atelier d’écriture est l’occasion de jouer avec les mots, de faire entendre sa voix, d’écouter celle des autres, de se découvrir. C’est avant tout une expérience ludique, le plaisir de réaliser quelque chose et de le partager. À chaque séance l’animatrice propose de nouvelles consignes, qui servent de point de départ à l’écriture. Cette règle du jeu, par son aspect contraignant, permet de libérer l’imagination. On n’est plus devant une inquiétante page blanche, mais devant une proposition d’écriture, qu’on pourra à son gré suivre de près ou subvertir discrètement. C’est ce qui fait tout le sel de la lecture des textes : on se rend compte que chaque participant a traité la consigne de façon personnelle, provoquant la surprise, le rire ou l’émotion. Les échanges, qui se font dans un esprit curieux et bienveillant, permettent à chacun de prendre du recul sur son propre texte.

Quelques textes du 4e atelier


Proverbes revisités

Après la pluie vient le beau temps.
Après le déjeuner vient la sieste.
Après la cuite vient le doliprane.

Pierre qui roule n’amasse pas mousse.
Mouche qui se mouche ne se laisse pas attraper avec du vinaigre.
Mouche qui se mouche ne prend pas la mouche.
Abeille qui butine ne mange pas de tagine.

Qui vole un œuf vole un bœuf
Qui chante le matin, danse le soir.
Qui se prend la tête, se prend les pieds dans ses chaussettes.

Araignée du matin, chagrin.
Rire du matin, pleurs du soir.
Sieste après manger, danger.

Les cordonniers sont les plus mal chaussés.
Les vampires ne sont pas les plus saignants.
Les assassins sont les plus mal butés.


Un discours pour convaincre


Sur une caisse à savon, dans la cour intérieure de l’immeuble, à côté des poubelles :

« Mesdames, Messieurs, alors voilà, avant que nous allions voter pour le remplacement du paillasson dans le hall d’entrée, je voudrais vous alerter sur l’ampleur de la catastrophe qui menace!...
En effet, outre le fait que Mme Burgelate ait des goûts… très personnels… disons ! et qu’elle veuille nous coller une sorte de chose à rayures « pour faire standing », comme ele dit… bref ! Il se trouve que, il se trouve que Mme Gobillot – ceux dont je fais partie et qui ont eu à l’emmener, souvent, hélas ! à l’hôpital, le savent – Mme Gobillot se prend souvent les pieds… dans le tapis ! Les pieds ou son caddie qu’elle peine aussi à faire traverser cette sorte de steppe drue et hostile . Sans parler de son chien qui hurle à la mort 2 fois par jour lorsque ses coussinets délicats entrent en contact avec la brosse.
Pour la défense des animaux, tout d’abord, et des mémés qui vont faire leurs courses , bien sûr ! Pour le bon goût dans son ensemble et pour le bien général, mais aussi… mais aussi… chers amis, pour sauver nos enfants, futurs asthmatiques, de la multitude d’acariens qui trouvent là une niche fiscale… heu...hivernale et font tousser , jusque dans nos bras, nos fils et nos compagnes ! Pour que n’importe qui ne vienne pas, chez nous ! essuyer ses pieds sur notre paillasson ! Citoyennes, Citoyens du 115 Boulevard Raspail ! Formons nos bataillons ! Marchons, marchons ! Qu’un paillasson impur débarrasse le portillon ! »
Elizabeth

La scène se situe en salle de réunion des copropriétaires.

Je suis Madame Etourneau 1er étage gauche. Sachez tout d’abord que je suis contre la mise en place d’un paillasson dans le hall de l’immeuble et je vais vous en donner les raisons :
Premièrement chaque matin, je descends mon petit chien Colibri pour sa petite commission, je dois vous dire que c’est un petit chien très sensible et qu’il ne supporte aucune moquette ni tapis et encore moins un paillasson.
Deuxièmement, malgré ma grande vigilance, j’ai souvent trébuché en entrant dans le hall de l’immeuble sur le paillasson installé par les prédécesseurs de notre concierge : M et Mme TAPIS, il y a 5 ans.
Troisièmement, je dois vous avouer par ailleurs que le tapis servait à l’occasion de lit à une personne dont je tairais le nom et qui habite l’appartement 33 et qui ne pouvait pas atteindre, tant il était enivré, le 2 étage à droite à côté de l’ascenseur. Plongé dans un coma éthylique, c’est au petit matin que M TAPIS venait le secouer (non pas le tapis !) l’homme sur le tapis pour l’éveiller.
Quatrièmement, le prix d’un paillasson dépasse aujourd’hui largement le prix de plantes que nous pourrions faire installer près de la loge de M IRIS notre concierge, ce qui assurerait l’harmonie des lieux.
Pour toutes ces raisons, Moi, Mme Etourneau, je vous invite à refuser la mise en place de ce paillasson qui pourrait être à l’origine de grands désastres pour cet immeuble et pour le bien être des propriétaires.

Gigi

Mes amis, colocataires, copropriétaires, heureux habitants de ce bel immeuble en pierre de taille, n'êtes-vous pas sensibles au scandale quotidien qui souille notre hall et nos escaliers? N'entendez-vous pas le cri du carrelage foulé par des chaussures boueuses, ne voyez-vous pas le chagrin du tapis terni par la poussière de vos pieds?
Je vous en conjure, mettons fin tous ensemble à ce drame. Réunissons nos ressources pour investir dans un grand paillasson, sur lequel nous essuierons nos pieds à l'entrée de l'immeuble. Ce paillasson n'est pas un simple objet d'hygiène. Il est bien plus que cela; il symbolise notre union sacrée contre la saleté, notre détermination à maintenir le statut de cet immeuble, notre fraternité. Oui mes amis, ce paillasson, c'est un peu l'affirmation de notre humanité dans le désordre du monde.
Tous ensemble, achetons un paillasson, et inscrivons dessus en lettres majuscules le mot BIENVENUE. Notre vie en sera embellie.
Vanessa

Portrait impressionniste

C'est un bel homme, pas un physique classique, mais il a quelque chose, un charme. C'est peut-être son visage, ses yeux verts, comme ceux d'un chat.
Il n'aime pas être pris en photo.
Il ne parle pas beaucoup, c'est un taiseux comme dit sa femme.
Ils se sont mariés il y a longtemps, ils avaient vingt-cinq ans.
Il a fait une école de gestion, ça ne lui a pas trop plu, alors il a voyagé ; il est allé un peu partout, surtout en Asie.
Il un tatouage sur le bras, un idéogramme chinois ; et un autre sur le poignet gauche.
Il aime écrire des carnets de voyage au stylo à plume.
Un jour, en Corée, il s'est perdu, et il s'est retrouvé dans un bordel. Les filles lui ont indiqué le chemin; mais il n'a jamais dit combien de temps il est resté avec elles avant de repartir.
Il se sent plus à l'aise à l'étranger que chez lui en Touraine. Il rêve secrètement de disparaître dans un pays lointain.
Il n'a pas d'enfants.
Il a un potager et quelques rosiers derrière la maison; ses mains sont rapeuses et ses ongles incrustés de terre. Il n'aime pas travailler avec des gants.
Il s'appelle Patrick; il n'aime pas trop ce prénom, mais il s'y est fait.
Il va souvent écouter des concerts dans les églises.
Vanessa

Il suit toujours le même itinéraire chaque matin, la rue du phare, puis le chemin de la plage des moussaillons.
Il est brun avec quelques cheveux blancs autour du visage.
Sa blouse blanche bien repassée laisse apparaître une chemise à rayures bleues.
Juché sur son vélo de triporteur, il secoue une petite clochette d’une main annonçant ainsi son arrivée
Sur la plage, de partout les enfants surgissent et s’agglutinent autour du triporteur.
L’homme, le sourire aux lèvres lève alors les couvercles des bacs, attrape un cornet et les remplit avec, selon les choix, de chocolat, vanille, fraise.
C’est Joe ! Le marchand de glace.
Gigi