Atelier d'écriture

L’atelier d’écriture est l’occasion de jouer avec les mots, de faire entendre sa voix, d’écouter celle des autres, de se découvrir. C’est avant tout une expérience ludique, le plaisir de réaliser quelque chose et de le partager. À chaque séance l’animatrice propose de nouvelles consignes, qui servent de point de départ à l’écriture. Cette règle du jeu, par son aspect contraignant, permet de libérer l’imagination. On n’est plus devant une inquiétante page blanche, mais devant une proposition d’écriture, qu’on pourra à son gré suivre de près ou subvertir discrètement. C’est ce qui fait tout le sel de la lecture des textes : on se rend compte que chaque participant a traité la consigne de façon personnelle, provoquant la surprise, le rire ou l’émotion. Les échanges, qui se font dans un esprit curieux et bienveillant, permettent à chacun de prendre du recul sur son propre texte.

Quelques textes du 10e lundi


Cadavre exquis... avec dernier mot apparent


J'ai été appelé à l'extérieur dans la rue,
une rue ancienne, pavée, bordée d'immeubles fissurés pleins de cachet.
Un cachet chaque matin et chaque soir, a dit le médecin. 
Le médecin alla passer des vacances à...
l'île de Sein. Il y passa des vacances mémorables.
Le temps est mémorable et beau
Beau comme un camion!

On entend par la fenêtre le bruit des travaux 
Ralentir travaux, il est écrit. Ralentissons! 
Pour ne pas accélérer la durée de vie, il faut prendre son temps.
Le temps n'est pas compressible,
compressible tel un K-way ou une tente Quechua
Quetzal et tutti quanti.

Écrire à plusieurs



Cendrillon était une belle jeune femme qui faisait tout dans la maison. Jadis elle était heureuse, jusqu’à ce que sa belle mère s’installe à la maison. Cendrillon était devenue la bonne à tout faire. La bonne à tout faire de sa belle mère et de ses sœurs. (Sylvie)

De plus, Cendrillon était taraudée par la peur que ses ennemies découvrent son secret. En effet, la belle jeune femme était en réalité un charmant jeune homme. Son père l’autorisait à porter des robes, et, pour préserver sa bonne entente avec sa nouvelle épouse, il ne lui avait rien dit. À part lui, tout le monde croyait que Sandro était Cendrillon, la plus malheureuse des trois sœurs. Mais l’approche du bal princier était pour Cendrillon un nouveau danger. (Vanessa)

En fait, le malheur pour lui était de porter les chaussures de Cendrillon. Certes, c’était du lézard de première qualité. D’un beau vert émeraude mais difficiles à enfiler. Trop difficiles du fait que 35 était la taille des dites chaussures. Huit pointures en moins ! Sandro prit son courage à deux pieds et s’exerça avec quelque succès à la marche. (Jacques-André)

Non seulement les chaussures étaient trop petites, mais en plus elles avaient des talons hauts. Néanmoins, à sa grande surprise, il parvint à donner le change malgré la douleur et le déséquilibre que ces chaussures provoquaient à ses grands pieds. Mais Sandro était d’un grand courage, capable d’endurer n’importe quelle souffrance pourvu qu’il puisse faire croire aux autres « qu’il était bien dans ses bottes ». Le lendemain de cette soirée mémorable il alla sans prendre rendez-vous chez le podologue de son quartier.  Avec force massages et coupures d’ongles de pied, ce dernier put apaiser un peu la douleur de Sandro. (Patrice)

***** 

Il existe, au coeur de la grande ville, des territoires secrets, où les règles de la civilisation n’ont pas cours… Des îlots avec leurs propres lois, leur hiérarchie, leurs règlements de compte en lien avec leur culture spécifique. On appelle ces enclaves des « cours de récréation ». Là, entre bandes d’enfants, se jouent des complots ignorés des adultes. Ainsi, à l’école élémentaire Jean Jaurès, trois gamins réunis sous un marronnier tiennent un conciliabule. (Vanessa)

Petit-Jean, auto-proclamé « le Chef », dit que cela ne serait possible qu’à une seule condition: il se réservera 60% des gains, Bert etAmédée se partageant les 40% restant. Tous deux se regardent et s’échangent muettement le message: comme d’hab, quoi! Ils acceptent la proposition du chef. Sur ce, Petit-Jean leur intima de le suivre vers le casino, à la fin des cours. (Jacques-André)

Ils longèrent donc la plage de Deauville d’un pas alerte et décidé en plaisantant, en se faisant des croche-pattes, en insultant les vacanciers en maillot de bain qui se dirigeaient vers la mer. Quand ils arrivèrent devant le casino de Deauville, ils se dirigèrent vers l’entrée et voulurent entrer. Le gardien se campa devant eux et leur dit d’un ton autoritaire: « Le casino est réservé aux personnes de plus de 18 ans, et vous semblez n’avoir que 10 ou 11 ans! » Ils rebroussèrent chemin et allèrent se baigner dans la mer froide. (Patrice) 

Ils se baignèrent jusqu’à la nuit tombée. Et dans la nuit ils faisaient peur aux passant. Ils faisaient tellement peur que certains joueurs du casino firent tomber leurs gains. Les chenapans ramassaient les gains, fiers d’eux. Le lendemain ils racontèrent leur aventure, trop fiers d’eux. Ceci tomba dans l’oreille d’un père de famille, père de l’un des gamins, et ils furent mis en prison. (Sylvie)

*****

Un petit chaperon vert alla voir sa grand-mère. elle lui apportait du faux-beurre. C’est un leurre, dira Mère-Grand. En chemin elle rencontra un jeune loup, bien fringué, tiré à quatre épingles. "Alors, mignonne, lui dit-il, où est-ce que je t’emmène dans ma Jaguar?" Un jeune loup en Jaguar, ce n’est pas banal, pensa-t-elle. "Menez-moi au parc zoologique", lui intima-t-elle. (Jaques-André)

Quand ils arrivèrent aux abords du parc, le jeune loup gara sa Jaguar à Saint Mandé et ils se présentèrent tous les deux à l’entrée du parc. Quand il les vit, le gardien prit son téléphone et dit: « Eh, les mecs, il est revenu avec une petite fille qui porte un truc bizarre vert ». Trente secondes après on vit arriver une petite camionnette d’où descendirent deux colosses qui embarquèrent le loup dans la cage à l’arrière du véhicule. (Patrice)

Les deux colosses descendirent, plus loin, de la camionnette, et mirent le loup à la fourrière de la S.P.A. Après dix jours de fourrière le loup fut mis avec les chiens à la S.P.A.  et personne ne voulait l’adopter, parce qu’il paraissait trop méchant. De plus il n’aboyait pas, il hurlait et faisait peur à tout le monde. Les agents de la S.P.A. faisaient en sorte d’en faire un bon toutou, mais les mois passaient et il n’était toujours pas choisi. À la fin les agents de la S.P.A. faisaient en sorte de le récompenser à chaque fois qu’il faisait le beau. (Sylvie)

Le loup finit par comprendre qu’il ne pourrait échapper à ses geôliers qu’en se montrant plus futé qu’eux. Il fit donc semblant. Il ne se vêtit pas d’une peau de mouton car il n’en avait pas sous la patte, alors il adopta les attitudes des chiens; il fit le coup des yeux attendrissants et se laissa caresser le museau sans mordre. Ses efforts portèrent leurs fruits. Une sympathique famille pavillonnaire, mari, femme et leurs trois enfants, accepta de l’adopter. Les yeux mouillés par l’émotion les employés de la S.P.A. regardèrent partir le jeune loup dans la Renault Espace de sa nouvelle famille. Encore une touchante histoire d’adoption! (Vanessa)

*****

Pris d'une soudaine et irrépressible inspiration, il alla chercher du papier et un stylo et se mit à écrire rapidement un poème incompréhensible, même pour lui-même. Quand il eut fini, il prit son smartphone, lut à haute voix le poème et s'enregistra. Quand il écouta l'enregistrement, il fut tout surpris et ne put s'empêcher de penser qu'il était aussi doué que Rimbaud. (Patrice)

Mais il n'était jamais content de lui. Il aurait préféré écrire comme Verlaine. Il était quand même content de lui et fier d'être un poète. Il allait se fixer à présent d'écrire comme Verlaine. (Sylvie) 

Il se lança donc dans une série de poèmes au rythme impair, sur des sujets verlainiens tels que les tableaux de Watteau ou la Ville de Paris pendant la révolution industrielle du 19ème siècle. Étrangement, son recueil intitulé « Variations vagues » fut refusé par tous les éditeurs. On lui reprochait un manque de modernité, on questionnait sa pertinence dans la société actuelle. Il en fut fort marri. (Vanessa)

Marri ! Il aimait ce terme et son assonance avec l'époux. Oui mais l'époux infernal avec qui il avait partagé une vie nomade entre Paris, Bruxelles et Londres, n'était pas l'idéal. Il gambergeait, consultait des cartes, échafaudait des plans avant de s'embarquer vers Java d'où il déserta et revint laborieusement au bercail chez la Mother tant aimée en dépit de tout. Adieu Verlaine, vaches, cochons et partir vers l'Ailleurs ! Enfin. (Jacques-André)


À partir d'une situation

La clé tourne dans la serrure, la porte s'ouvre... 


 La clé tourne dans la serrure, la porte s'ouvre. Le chien s'ébroue, émet un petit cri et s'en va. Adeline, la maîtresse de maison, tend posément ses lèvres qu'il accueille comme il se doit.
Quel plaisir de retrouver le calme, l'intimité et le rien-faire ! Il prend le temps d'échanger avec Adeline avant de regarder le tableau abstrait figurant néanmoins un bord de mer. Que dirais-tu d'une virée en Bretagne ? Adeline accueille la proposition avec joie. Le souvenir des rochers dans la mer, les vagues d'écume, le couchant sur le sémaphore lui reviennent instantanément.

La clé tourne dans la serrure, la porte s'ouvre. Là sont entreposés les cartes, les brochures et les livres de voyages. Allan saisit le guide Bretagne Nord qu'il consulte distraitement avant de se mettre à la préparation du repas. Demain, je passerai à la banque, annonce-t-il. Le lendemain, à la banque, il se fait conduire à la salle des coffres.

La clé tourne dans la serrure, la porte s'ouvre. Il est toujours émerveillé comme un enfant un soir de Noël lorsqu'il soupèse les liasses de billets contenues dans diverses enveloppes de papier kraft. Il extrait deux liasses et referme la porte du coffre. Le loueur de voitures accepte très naturellement le règlement en liquide.

La clé tourne dans la serrure, la porte s'ouvre. Le voilà à bord d'un véhicule Tesla qui le conduit jusque chez lui. Adeline a préparé quelques bagages, confié le chien au voisin et sourit devant les perspectives de petites vacances en amoureux. L'automobile a choisi l'itinéraire...et vogue le navire !

Jacques-André

*****


Quand Céleste sortit de l’ascenseur au sixième étage de l’immeuble, elle eut la mauvaise surprise de constater que la lumière était éteinte. Elle chercha l’interrupteur comme une aveugle car elle était dans le noir le plus total. 

Il lui fallut palper tous les murs de l’étage et aussi les portes des appartements.

Quand au bout de trois minutes elle trouva enfin la minuterie, elle eut la deuxième mauvaise surprise de la soirée : la minuterie semblait ne pas fonctionner.

Que faire ? Il lui fallait en plus trouver quelle était la bonne porte…

Le numéro de l’appartement était le 64. Comment le trouver ?

Elle se mit à parcourir les abords des différentes portes et eut enfin la chance de tomber sur le 64.

Elle sortit donc la clef de son sac et réussit du premier coup à l’introduire dans la serrure et ouvrit la porte de l’appartement. Ce fut alors qu’elle eut enfin la surprise la plus inattendue de la soirée : l’intérieur de l’appartement était éclairé et elle entendit un «bon anniversaire Céleste » d’au moins une trentaine de personnes qui rigolaient comme des fous. Son mari, ses trois enfants et tous ses amis étaient là.

Folle de joie, elle apprit quelques minutes plus tard que l’obscurité avait été volontairement organisée par son mari, histoire de rendre la surprise…. encore plus surprenante. 

Patrice


À partir de cartes du jeu Dixit


On lui reproche d'avoir la tête dans les nuages. L'escargot répond qu'il a un rêve: il veut gravir cet escalier en colimaçon à l'image de sa coquille, cette volée de marches menant on ne sait où; il veut la gravir jusqu'au-delà des nuages. Il y passera le temps nécessaire, sa vie entière, peut-être, et un jour il verra au-delà des nuages.
Pour commencer, il se hisse sur la première marche, admire la nouvelle perspective, et se repose un instant avant d'attaquer la deuxième marche. La-haut, les nuages l'attendent.

Vanessa

D’où ce monstre marin peut-il bien nous venir ?
D’une intense couleur verte son corps nous impressionne
Il se couche sur le sable à côté du menhir
Et ouvre sa grande gueule dès que la cloche sonne
Ses dents blanches acérées entourent ses mâchoires
D’où survient brusquement dans la douceur du soir
Un petit prince rose qui s’envole vers le ciel
Attiré par la vue d’une princesse très belle

Patrice

Dans le pays de Khorsand vit un enfant qui se prend pour un rongeur-artiste. Le petit palais dans lequel il passe ses journées ne laisse de l'impressionner. Les pièces tout autour sont immenses, peintes de couleurs vives. L'ouverture sur l'extérieur donne sur un ensemble de bâtisses propres à faire naître les contes.
L'enfant a un passe-temps : jouer de la flûte, mais cette flûte a pour originalité de se transformer en un gentil serpent !
Le gentil serpent patiente le temps qu'il faut avant de proposer une sortie. Pour l'occasion le serpent décore le cou de l'enfant. Ils vont au souk, y achètent qui un loukoum, qui une petite souris, enfin toutes choses à déguster en se promenant.
Par hasard ils rencontrent le Chef de Khorsand, richissime magnat magnanime.
Que désirez-vous par-dessus tout ? leur demande-t-il.
Ils se gardent bien d'émettre quelque souhait que ce soit car ils savent qu'une réponse qui ne conviendrait pas au magnat magnanime... leur assurerait la geôle. Ils sourient et se retirent tout en s'inclinant respectueusement et vont reprendre leurs activités au petit palais.

Jacques-André